Entre souvenirs et générations dorées, Cissé et Diawara livrent leur analyse du football africain
Le lundi 24 novembre 2025, Carréfoot a ouvert une fenêtre sur l’histoire et l’héritage du football africain à travers la deuxième partie d’un webinaire au thème évocateur : « Témoignages : Histoire et héritage du foot africain ». Modéré par Stéphane Ahoa, l’événement a réuni deux figures importantes du football africain, Bacary Cissé et Fousseni Diawara. L’un, journaliste sénégalais chevronné, président de la ligue de Ziguinchor et conseiller de Sadio Mané, l’autre, ex-international malien devenu sélectionneur U23 et consultant Canal+. Ensemble, ils ont livré un récit vibrant, mêlant souvenirs intimes, constats lucides et visions d’avenir.
Des parcours qui racontent une histoire
Bacary Cissé a rappelé son itinéraire marqué par plus de deux cent huit voyages aux côtés des Lions du Sénégal, une vie de terrain et de passion. Aujourd’hui, il gère la carrière de Sadio Mané et dirige un club de National 2 financé par l’attaquant sénégalais. Fousseni Diawara, lui, a retracé une carrière majoritairement en France avant d’endosser des responsabilités techniques au Mali et en Guinée, puis de partager son expertise sur Canal+. Deux trajectoires différentes mais un même fil conducteur qu’est de servir le football africain.
Sur la question de la vision du football, Cissé a nuancé : « Tout n’est pas mal mais tout n’est pas rose aussi », soulignant la nécessité de se serrer la ceinture pour avancer. Pour lui, l’indépendance des structures africaines, notamment de la CAF, est la clé pour que le football continental « sorte la tête de l’eau et soit au top ». Diawara, de son côté, a insisté sur la responsabilité des sélectionneurs et sur la transmission : « Ce qui m’anime aujourd’hui, c’est la passion, le plaisir que je peux prendre et le fait de transmettre ».
La jeunesse face au défi du temps
La relève a occupé une place centrale dans les échanges. Diawara observe que « le football va beaucoup plus vite » et que les jeunes de 18 à 22 ans côtoient désormais des joueurs aguerris en équipe A. Il insiste sur l’importance d’attirer les binationaux en cultivant la fierté du maillot malien. Cissé, lui, met en avant l’effervescence au Sénégal, où plus de quatre cents clubs amateurs se professionnalisent mais rappelle que l’encadrement doit suivre pour transformer cette dynamique en véritable évolution.
Les témoignages ont ensuite pris une dimension émotive. Cissé a évoqué avec ferveur la CAN 2022 remportée par le Sénégal comme moment marquant de sa carrière : « Cette finale, c’était le plus beau jour de ma vie en tant que journaliste sportif ». Nourri par le football en général et par le football africain en particulier, Fousseni Diawara évoque ses premières sources d’inspiration à travers la CAN 1992 au Sénégal, qu’il découvre à l’âge de 11 ans, précédée par la Coupe du monde 1990 où le Cameroun avait ouvert la voie de l’intérêt continental. Impossible de rester insensible à ces moments fondateurs, renforcés ensuite par le Ballon d’or de George Weah et son premier voyage au Mali à 15 ans.
Dans un élan d’éloges, Bacary Cissé a salué l’humilité et la simplicité de Diawara, rappelant une anecdote de sa première venue au Sénégal lors d’un match amical, symbole de son attachement sincère et discret au jeu. Diawara, lui, a insisté sur le devoir patriotique : « Il faut rendre au football et au Mali ce qu’il nous a donné ». Pour lui, la mémoire des légendes doit être incarnée dans les lieux. Les stades et salles de presse devraient porter les noms des anciennes gloires, afin que « même les murs parlent à travers des photos des anciens » pour préserver l’héritage du football africain.
La question des infrastructures est revenue avec force suite à la question de l’axe d’amélioration. Diawara a frappé les esprits avec une image : « Si vous avez une Ferrari et les routes du village, elle ne pourra pas rouler ». Il a rappelé les efforts en cours avec cinq stades aux normes CAF au Mali. Cissé, quant à lui, a insisté sur la valorisation des anciens et sur l’indépendance des structures africaines pour inspirer les jeunes générations.
Sadio Mané, incarnation d’une ascension
La figure de Sadio Mané a cristallisé l’admiration des deux invités. Pour Cissé, l’attaquant est « l’incarnation positive de la société sénégalaise », symbole de rigueur et de planification. Diawara estime que son travail a même mérité un Ballon d’or mondial, soulignant le respect que Mané inspire jusque chez les adversaires maliens.
La conclusion de ce magnifique moment d’échanges s’est tournée vers l’avenir, en l’occurrence le tournoi continental prévu au Maroc. Cissé espère un second sacre pour le Sénégal, convaincu que « cette génération dorée » peut écrire une nouvelle page de l’histoire. Diawara, plus mesuré, voit le Maroc comme favori, sans négliger le Sénégal, la Côte d’Ivoire et l’Égypte pour son expérience dans le continent. Le webinaire s’est achevé par une interaction chaleureuse avec les internautes, les invités saluant l’initiative de Carréfoot et le plaisir de partager leurs expériences.
Ce webinaire a offert bien plus qu’un simple échange puisqu’il a révélé la profondeur des parcours, la force des convictions et l’urgence des défis. Entre mémoire et avenir, Bacary Cissé et Fousseni Diawara ont rappelé que le football africain est une histoire portée par des hommes de passion et de devoir et qu’il appartient aux nouvelles générations de prolonger cet héritage.