FACE À LA MARGINALISATION DES COMPÉTITIONS LOCALES : Moussavou H. Billa exhorte les fédérations à repenser leurs priorités

Dans l’univers du football africain, une fracture structurelle se dessine de plus en plus clairement au point où les compétitions locales sont largement délaissées, étouffées par l’omniprésence des équipes nationales. Lors du 8e Webinaire de Carréfoot, placé sous le thème « FÉDÉRATIONS ET MÉDIAS : REGARDS CROISÉS SUR LE FOOTBALL AFRICAIN », le journaliste sportif burkinabè Moussavou H. Billa, présentateur à Canal+, a tiré la sonnette d’alarme dans une analyse directe, argumentée et sans complaisance sur l’état du football local sur le continent.

Pour lui, la racine du problème est simple « Les compétitions locales sont très peu médiatisées, principalement parce que les dirigeants de nos fédérations concentrent leurs efforts sur les équipes nationales. » Une déclaration forte qui met en lumière l’existence d’une hiérarchie des priorités mal orientée. Dans de nombreux pays d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale, les fédérations fonctionnent presque exclusivement sous perfusion de l’État, via les ministères des Sports. Ces derniers allouent des budgets censés soutenir l’ensemble du football national, mais dans la réalité, les fonds sont en grande partie absorbés par les sélections. Moussavou Billa précise que ce déséquilibre se renforce avec les nombreuses charges liées aux équipes nationales notamment les frais de mission pour les dirigeants, primes des joueurs, logistique des regroupements, etc. « Toute la machine fédérale semble alors tournée vers un seul objectif : faire briller les sélections, quitte à oublier le reste », note-t-il. Résultat des courses, les compétitions locales sont sans médiatisation. La preuve d’un manque d’ambition et de stratégie autour des championnats nationaux de la part des dirigeants.

Et pourtant, les championnats nationaux devraient représenter le socle du football africain. Mais dans les faits, leur gestion reste souvent réduite à une logique purement administrative. Pour de nombreux dirigeants, le simple fait de terminer la saison à bonne date est perçu comme un succès. Une attitude que Moussavou H. Billa critique sévèrement. « Il ne s’agit pas uniquement de dérouler des matchs, mais de créer autour de ces compétitions une véritable dynamique événementielle. » Il dénonce également un manque flagrant d’ambition dans la valorisation des championnats locaux. Contrairement aux matchs des sélections, qui génèrent une forte mobilisation patriotique et attirent les médias comme les sponsors, les compétitions locales restent largement invisibles. « Mais pourquoi ne pas chercher à insuffler le même élan autour des championnats locaux ? », s’interroge-t-il.

Moussavou H. Billa rappelle que chaque club a sa base de supporters, son identité propre, et donc un potentiel de rayonnement. Pourtant, peu d’efforts sont faits pour établir des partenariats économiques ou mettre en place des échanges publicitaires autour des compétitions. « Chaque club a son public, ses supporters. Pourtant, les fédérations ne font pas suffisamment d’efforts pour aller vers les sponsors et les partenaires. Peu d’initiatives sont prises pour développer des échanges publicitaires, des collaborations en nature, ou des stratégies de visibilité médiatique. » Le message du journaliste à l’endroit des dirigeants est limpide, il faut repenser en profondeur la manière dont les compétitions locales sont organisées et perçues. Elles doivent bénéficier de la même attention que les équipes nationales. « Il est grand temps de valoriser nos compétitions locales, de leur accorder une vraie place dans la stratégie globale du football national. Ce sont elles qui font vivre le football au quotidien, et qui permettent de faire émerger les talents de demain. » pense-t-il. Au terme de se diagnostic il est important que tous les acteurs comprennent que le football africain ne pourra prétendre à un développement durable que s’il place ses compétitions locales au cœur de ses priorités. Car si les équipes nationales représentent la vitrine du continent, ce sont bel et bien les championnats locaux qui en constituent les fondations solides.

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